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Ingénierie Patrimoniale

Ingénierie Patrimoniale | 01-08-2023

Dutreil : la location meublée au programme de l’été ! Une opportunité s’ouvre à tous ceux qui savent se décider vite

MAJ le 30/10/2023 _ Comme nous l’anticipions, la fenêtre de l’éligibilité au dispositif Dutreil de l’activité de location meublée, mais aussi de location équipée et de toute activité de location immobilière de placement, devrait s’être refermée suite au texte de la première partie du projet de loi de finances pour 2024, déposé selon la procédure du 49-3 par le Gouvernement.
L’entrée en vigueur prévue est au 17 octobre 2023. Sauf changement dans le texte définitif de la loi de finances pour 2024, ce qui parait improbable pour cette disposition, seules les transmissions réalisées jusqu’au 16 octobre 2023 pourront alors se prévaloir de la jurisprudence favorable, commentée dans l’article, et de la décision favorable du Conseil d’Etat du 29 septembre 2023.

La location meublée a une qualification torturée

Une activité juridiquement civile sans conteste [1] s’est vue rangée fiscalement dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux depuis une jurisprudence du Conseil d’État de 1925… Voilà l’origine de ce casse-tête fiscal ! Depuis, à chaque dispositif fiscal favorable à l’égard d’une activité commerciale sans plus de précision, le praticien doit décider si la location meublée fait partie des activités éligibles.

Est une activité commerciale ce qui est juridiquement une activité commerciale…

Le principe qui semblait assez inébranlable jusqu’alors était qu’en présence d’un texte de loi prévoyant un dispositif en faveur d’une activité commerciale, en l’absence de précision quant à la définition à retenir, on doive retenir une activité commerciale au sens strict, c’est-à-dire une activité juridiquement commerciale.

Ce principe était ainsi mentionné notamment dans la doctrine administrative à propos de l’exonération d’impôt de solidarité sur la fortune en faveur des biens professionnels.
Documentation administrative 7-S-3311 n°4 : « En raison des termes employés par le législateur (la loi ne fait pas référence, à cet égard, aux dispositions du CGI), les activités commerciales doivent normalement s’entendre de celles revêtant ce caractère en droit privé ».

Par conséquent, les activités non commerciales au sens de l’article 110-1 du Code de commerce, comme l’est la location meublée, étaient exclues dès lors qu’aucun tempérament ne permettait une extension aux activités civiles relevant de la catégorie d’imposition des bénéfices industriels et commerciaux dont de nombreuses sont mentionnées à l’article 35 du Code général des impôts.

Pour éviter toute ambiguïté à propos d’activités patrimoniales, plusieurs textes excluent expressément les activités de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier.
C’est le cas de l’article 150-0 B ter du Code général des impôts excluant ces activités des réinvestissements éligibles permettant de conserver le bénéfice du report d’imposition en cas d’opération apport de titres moins de 3 ans avant leur cession.
On citera également la réduction d’impôt sur le revenu pour souscription au capital de PME (article 199 terdecies-0 A du Code général des impôts).

On le voit, cette notion d’activité commerciale au regard de dispositifs fiscaux est assez trouble, mouvante selon l’impôt et la disposition concernés.

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Dutreil : 25 ans de questionnement avec une courte parenthèse qui semblait refermée

Le dispositif Dutreil [2] n’a pas fait exception, bien au contraire. Ce dispositif, introduit en 1999, en vue de favoriser la transmission à titre gratuit des entreprises dont l’avantage est une exonération de 75 %, ne contient aucune précision légale quant à l’activité commerciale exercée. L’administration ne commenta de façon un peu explicite ses contours qu’en mars 2012 dans une instruction fiscale [3] reprise peu après dans le BOFiP [4].
Après une période pendant laquelle l’insertion de la location meublée à l’article 35 du CGI a permis par renvoi des commentaires BOFiP une éligibilité bien involontaire, l’administration conclut en avril 2021 [5] explicitement que sont exclues du dispositif Dutreil les « activités de location de locaux meublés à usage d’habitation ». Notre dernier article [6] sur le sujet en était resté là.

Nous avions énoncé que pour le moins la position de l’administration ne nous semblait pas être considérée comme expressément illégale au regard des articles 787 B et C du CGI.
En l’absence de jurisprudence interprétant l’activité commerciale en matière de droits d’enregistrement incluant les activités mentionnées à l’article 35 du CGI, il était plus avisé alors de s’orienter vers des stratégies de transmission alternatives. En effet, le comité de l’abus de droit avait même énoncé une position relativement négative dans l’affaire n°2015-09 [7], en présence d’une société réalisant une « activité de location de locaux d’habitation meublés et de locaux commerciaux nus […] assortie d’aucune autre prestation. Par suite, cette société exerce une activité civile et non une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, seule visée par l’article 787 B du code général des impôts. »

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1er juin 2023 : coup de théâtre de la Cour de cassation

La Cour de cassation [8] dut se prononcer dans une affaire relative au dispositif Dutreil, mais en présence d’une société réalisant une activité de location équipée (la cousine de la location meublée, ne concernant pas des locaux d’habitation mais des locaux professionnels).
Elle considéra l’activité de location équipée comme éligible au dispositif Dutreil au regard de sa mention à l’article 35 du CGI.

Reste à savoir si c’est fondamentalement la mention à l’article 35 du CGI ou l’imposition dans la catégorie des BIC qui justifie selon elle son éligibilité. En effet, des activités non commerciales et non mentionnées à l’article 35 sont imposées dans cette catégorie fiscale, comme la location avec clause recettes de locaux professionnels par exemple.

En l’absence de mention dans la rédaction actuelle des articles 787 B et C du CGI d’une exclusion des activités de gestion de son propre patrimoine, il est alors possible de se prévaloir du dispositif Dutreil pour au moins toute activité relevant de l’article 35 du CGI, dont la location meublée.
Il est question de la nature de l’activité et non du statut du loueur ou des modalités d’exercice. Par conséquent, la qualification de professionnel ou non au sens de l’article 155,IV du Code général des impôts (LMP) est sans incidence.

On relèvera qu’un autre arrêt de la Cour de cassation fut publié en date du 23 juin 2023 n°21-18226. Il est relatif à l’application du dispositif Dutreil à une activité de loueur en meublé, mais ce n’est pas l’éligibilité de l’activité qui était contestée par l’administration. Le défunt donnant en location long terme à une société réalisant l’activité de sous-location pour de courtes durées, l’administration considérait que l’activité de location meublée n’était pas exercée par le défunt.
La Cour a cassé l’arrêt d’appel au motif que les juges du fonds n’avaient pas recherché si l’activité était exercée [9].

Cet arrêt semble ainsi renforcer l’éligibilité selon la Cour de cassation de l’activité de location meublée, tout en attirant notre attention sur les modalités d’exercice de la location meublée.

Exemple :
>Valeur logement(s) en nue-propriété 1 M€ appartenant au donateur
> Donation à un enfant dont l’abattement individuel est épuisé

Pas de Dutreil Dutreil Economie
Droits de donation (arrondis) 250 k€ (25 %) 50 k€ (5 %) 200k€

 

Remarque : les émoluments de notaire resteront calculés sur la valeur vénale sans abattement

Conditions à remplir : cela se complique !

La condition d’éligibilité de l’activité remplie, s’élèvent des difficultés selon les modalités d’exercice de l’activité.

Modalités d’exercice

Nom propre
CGI art.787 C

Société non IS
CGI art. 787 B

Société IS
CGI art. 787 B

Acquisition à titre onéreux depuis minimum 2 ans

Oui

Sans objet

Conditions d’exercice suite à la transmission

Poursuite de l’activité
CA Pau 10 janvier 2013
CA Grenoble 08 septembre 2015
Beaucoup plus facile à remplir !

Exercice de l’activité professionnelle principale

Fonction de direction mentionnée pour exonération IFI des biens professionnels

Personne devant respecter la condition d’exercice

Héritier, légataire, donataire

> Donataire, héritier ou légataire
> ou membre de l’engagement collectif de conservation (notamment donateur ou autre associé)

Assiette exonérée

Seuls les biens affectés.

Trésorerie, placements inscrits au bilan sont exclus en principe

Valeur des titres (y compris placements)…
Mais nécessité d’activité éligible prépondérante (critères BOFiP :
> 50 % du CA issus de l’activité éligible
> et actif brut affecté > 50 % actif brut)

Ainsi, la condition d’exercice la plus simple à respecter concerne l’exercice en nom propre car il suffit de poursuivre l’activité, sans qu’elle ait à être qualifiée de professionnelle ou de principale, condition exigée en cas de société non soumise à l’impôt sur les sociétés.

Une société non soumise à l’impôt sur les sociétés, dont la SARL de famille, ne bénéficiera ainsi que difficilement du dispositif. Il faudrait pour cela que la gestion nécessite une implication forte, ce qui écarte dans la quasi-totalité des cas les logements loués par bail commercial dans les résidences services et les biens donnés en gestion. Les locations saisonnières exploitées sans aucune délégation peuvent en revanche justifier, dans certaines situations à apprécier, de cette qualification d’exercice à titre professionnel et principal.

La société soumise à l’impôt sur les sociétés bénéficie d’une condition d’exercice se limitant à l’exercice d’une fonction de direction, sans exigence de rémunération, et elle peut même être réalisée par le donateur.

Le passage à l’IS permet ainsi de remplir aisément les conditions d’exercice sous réserve d’avoir bien évaluer le coût de ce changement de régime fiscal.

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Indivision, démembrement, minorité ?

En cas d’indivision exploitant la location meublée, on peut estimer la transmission éligible au dispositif Dutreil bien que la doctrine administrative ne mentionne pas expressément cette situation relativement rare concernant les entreprises en général mais fréquente en matière de location meublée.

L’administration admet, en effet, la transmission de droits indivis éligible sans que soit énoncée que l’indivision nait à l’occasion de la transmission. BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40 n°10

Le texte légal mentionne la transmission de l’entreprise en totalité ou d’une quote-part indivise.
Peut-on allotir des bénéficiaires de certains logements et non pas de quotes-parts indivises ?
L’administration énonce [10] que « l’exonération partielle est susceptible de s’appliquer dans l’hypothèse d’une transmission à titre gratuit d’une partie de l’exploitation, dès lors que les éléments cédés peuvent faire l’objet d’une exploitation autonome ».
La location meublée d’un logement pouvant être en principe exploitée de façon autonome logement par logement, il ne serait pas nécessaire de transmettre de façon indivise la propriété du logement.

Néanmoins, en cas de transmission de la nue-propriété des logements affectés à l’exploitation de la location meublée exercée en nom propre, quelques interrogations surgissent :
La transmission de la nue-propriété est-elle éligible ?
Le texte de l’article 787 C du CGI a été aménagé suite à la loi en faveur des PME du 02 août 2005 afin d’ouvrir le dispositif aux transmissions démembrées. En effet, la mention « en pleine propriété » a été supprimée. Ceci fut confirmé par la réponse ministérielle n° 73315 JOAN du 03 janvier 2006. L’absence de mention expresse dans les termes de l’article ou dans les commentaires BOFiP ne doit ainsi pas être vue comme un obstacle.

Si le bénéficiaire de la transmission n’est que nu-propriétaire, à quel titre poursuit-il l’exploitation ? L’usufruitier du logement est en principe considéré comme l’exploitant.
Il n’existe pas de commentaire administratif ou de jurisprudence à notre connaissance sur cette question.
Afin de sécuriser la transmission, on pourra alors paramétrer la transmission en vue de remplir cette condition.

Il est possible de donner à des enfants mineurs. En effet, l’activité étant civile il n’existe pas d’incapacité ou d’interdiction. Par ailleurs, tous les bénéficiaires n’ont pas l’obligation de poursuivre l’activité, mais seulement l’un d’eux.

Emprunts

L’endettement est un obstacle à la transmission.  En effet, il sera en principe prévu dans les conditions, souvent générales, du prêt que le changement de propriétaire est soumis à autorisation de la banque.

Les garanties prises sur le logement (hypothèque, par exemple) ne s’opposent pas à la transmission mais continuent de grever le bien.

En cas de détention des logements en société, les conditions de prêt prévoient, selon les conventions de prêt, une simple information du prêteur mais aussi souvent une autorisation expresse en cas de changement d’associé.

Le non-respect des conditions de prêt est en principe sanctionné par la déchéance du terme, c’est-à-dire l’exigibilité du capital restant dû. Par ailleurs, en cas de passif (emprunts bancaires, comptes courants d’associés) important de la société, sa valeur étant réduite, l’intérêt de recourir au dispositif Dutreil avec ses contraintes perd de sa pertinence.

Et si l’on ajoute à cela la probable nécessité d’agir dans de brefs délais, on écartera ces situations de celles prioritaires à une donation sous dispositif Dutreil.

Dépêchez-vous : durée possiblement limitée !

Vous l’aurez compris, cette décision est inattendue et contraire à l’analyse de l’administration exposée dans les commentaires BOFiP d’avril 2021.

D’expérience, il est possible voire probable que la prochaine loi de finances remette en cause l’éligibilité de la location meublée et de toute activité de gestion de son propre patrimoine, et ce avec effet immédiat à la publication du projet de loi.

Suite à l’arrêt de la Cour de cassation, un recours pour excès de pouvoir semble en cours pour annuler les commentaires BOFiP excluant les activités de locations immobilières, ce qui permettrait une clarté et une sécurité totale pour le contribuable le cas échéant. Mais le changement de loi risque de faire avorter cette initiative avant son terme.

La loi ne pouvant être rétroactive en matière de droits de mutation, il nous semble alors pertinent d’analyser l’éligibilité de ses actifs représentant des logements loués meublés et de s’interroger sur la pertinence de donner à brève échéance.

[1] Confirmée par la Cour de cassation sans discontinuité depuis 1862

[2] IS – Champ d’application et territorialité – Collectivités exclues du fait d’une option pour le régime des sociétés de personnes – SARL à caractère familial 100 et suivants reprise de la documentation de base 4H1221 n°22

[3] Instruction du 22 mars 2012 BOI 7 G-3-12

[4] BOFiP-impôts BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 n°10

[5] https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/13033-PGP.html/ACTU-2021-00157

[6] Location meublée et Dutreil : l’administration clôt le débat…

[7] Séance du 6 novembre 2015 : avis rendus par le comité de l’abus de droit fiscal commentés par l’administration (CADF/AC n° 07/2015)

[8] Cass. Com 1er juin 2023 n° 22-15.152

[9] Concernant l’activité de location meublée, la situation où il y aurait sous-location, location de longue ou de courte durée nous semble sans incidence, l’activité restant qualifiée de meublée et donc visée à l’article 35 du CGI. La seule question réside dans le changement d’activité entre une location de courte durée puis une location de longue durée à une société si ce changement est opéré moins de deux ans avant la transmission.

[10] BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40 n°110

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