Ingénierie Patrimoniale
Ingénierie Patrimoniale | 29-05-2018
La location de la résidence secondaire : des cas d’apatridie fiscale ou le symbole d’un régime « bricolé »
La location meublée est un régime très complexe
Ce régime est un assemblage :
> de règles de fiscalité professionnelle notamment de par son rattachement au régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), légal depuis les revenus 2017 ¹,
> de règles de fiscalité des particuliers pour ce qui est notamment de la plus-value réalisée par des loueurs non professionnels au sens de l’impôt sur le revenu² ,
> et de règles dérogatoires propres (bien qu’elles tendent à se raréfier³)
Cet état de fait a pour conséquence certaines zones d’ombres, pas toujours clarifiées par la jurisprudence ou l’administration (l’exemple le plus flagrant est la question de l’éligibilité de la location meublée au dispositif Dutreil en faveur des transmission d’entreprise par donation ou succession), avec également de très nombreux retournements de situations 4
On pourra citer le revirement de l’administration à propos de l’éligibilité du loueur en meublé professionnel aux dispositif de l’article 151 septies B du CGI consistant en un abattement pour délai de détention très favorable appliqué à la plus-value long terme relative à des immeubles d’exploitation. BOFiP-impôts BOI-BIC-PVMV-20-40-30 n°210 modifié en avril 2017
Un degré de plus dans la complexité a été franchie.
Le traitement fiscal de l’occupation personnelle
Les commentaires administratifs d’avril 2017 ont énoncé les règles suivantes 5 au sujet de l’occupation personnelle d’un bien inscrit à l’actif :
– Loueur en meublé non professionnel (LMNP) : comptabilisation en produits des périodes d’occupation
– Loueur en meublé professionnel (LMP) : non comptabilisation en produits des périodes d’occupation mais retraitement des charges correspondantes qui sont extournées.
Je ne reviendrais pas sur les raisons complexes qui ont inspiré cette position de l’administration.
J’attire seulement l’attention sur ses conséquences malheureuses sur des situations qui semblent au premier abord anodines.
Une situation kafkaïenne
Exemple : un loueur en meublé loue un ou plusieurs biens, dont sa résidence secondaire inscrite à l’actif pour 15 K€ / an. On peut évaluer la valeur de la période d’occupation personnelle à 10 K€.
Nous retiendrons comme hypothèse que son foyer fiscal dispose de faible pension de retraite ou de faible revenu d’activité (15 K€ par exemple) voire qu’il est rentier.
Si on le considère comme LMNP, ses recettes sont de 25 K€.
Depuis la décision du Conseil constitutionnel supprimant la condition d’inscription au registre du commerce et des société (RCS) 6 le loueur est donc professionnel LMP.
Si le loueur est LMP : on ne retient pas l’occupation privative, soit des recettes atteignant seulement 15 K€. Le loueur devient donc non professionnel (LMNP)… mais dans ce cas il faut retenir 25 K€ de recettes annuelles et il devient LMP…
Aucune qualification n’est donc possible.
Le praticien est donc face à une boucle insoluble, un paralogisme fiscal !
Quelle case remplir dans la déclaration d’impôt sur le revenu ? Le loueur sera-t-il soumis aux cotisation sociales ?
Voici une nouvelle illustration du fait que notre système fiscal (et social) est devenu hors de contrôle par sa complexité, y compris de la part de l’administration.
1.Article 35 du Code général des impôts
2.Article 155, IV du Code général des impôts
3.La dernière disparition en date est un dispositif autonome d’exonération d’ISF l’article 885 R du CGI. Les dispositions relatives à la location meublée à l’IFI sont devenues un sous ensemble de l’exonération des biens professionnels de droit commun (article 974, V – 1° du CGI)
4.On pourra citer le revirement de l’administration à propos de l’éligibilité du loueur en meublé professionnel aux dispositif de l’article 151 septies B du CGI consistant en un abattement pour délai de détention très favorable appliqué à la plus-value long terme relative à des immeubles d’exploitation. BOFiP-impôts BOI-BIC-PVMV-20-40-30 n°210 modifié en avril 2017
5.BOFiP-impôts BOI-BIC-CHAMP-40-20 n°59
6.QPC 08 février 2018 n°2017-689 décision rendue au regard des dispositions du Code de commerce et de la notion de critère objectif et rationnel et ainsi transposable à l’article 155,IV du CGI.